La magnétohydrodynamique (MHD)
Le 1er mars 2018 le Président russe a prononcé son discours annuel devant les « Corps constitués de la Fédération de Russie ». (1)
La presse occidentale a largement commenté et critiqué la seconde partie du discours où Vladimir Poutine fait état de nouveaux armements mis au point la Russie, et particulièrement de certains dont l’effet serait de rendre inopérantes les défenses antimissiles de l’ennemi. En cas d’attaque subie par le pays, l’agresseur n’aurait aucune possibilité de se protéger de la réponse russe. Plus encore la Russie serait aujourd’hui à même de frapper n’importe quel point du globe et il n’existerait aucune manière de se défendre de ces nouveaux armements.
Le Président russe a été largement accusé dans la presse de menacer l’Occident, d’avoir produit de ridicules simulations vidéo vieilles de 10 ans, mais aussi et peut-être surtout de bluffer.
Sur le fond les Russes considèrent que les Américains ont rompu un pacte basé sur un équilibre de la menace nucléaire, le fameux « équilibre de la terreur » : si chacun possède à peu près les mêmes moyens de détruire l’autre, qu’en cas de frappe l’adversaire pourra répondre par une salve de missiles nucléaires et que la destruction des deux belligérants est quasi certaine en cas de conflit, alors chacune est incité à se montrer prudent. C’est l’équilibre de la guerre froide, qui a prévalu pendant plusieurs décennies.
Les Russes prétendent que les Américains ont voulu profiter de la débâcle soviétique et de la désorganisation dans laquelle s’est retrouvé le pays dans les années 90 pour se placer comme première puissance nucléaire incontestée en développant une stratégie de « primauté nucléaire » (2), c’est à dire une capacité à frapper en premier et détruire n’importe quel adversaire dans le monde, sans craindre d’avoir à subir en retour de dégâts significatifs, grâce à un système perfectionné d’interception des missiles de l’ennemi. Dans cette configuration on comprendra qu’il était tout à fait utile d’installer les batteries de lancement de missiles anti-missiles le plus près possible des frontières du dit ennemi.
Vladimir Poutine dans son discours rappelle que les Russes ont signé dans les années 70 des accords de désarmement (ABM) dont les Américains se sont unilatéralement retirés au début des années 2000, contre l’avis de la Russie.
Voilà que maintenant il déclare que cette période de suprématie américaine est révolue, que son pays a développé de nouveaux armements tellement novateurs qu’il est actuellement impossible de s’en protéger, que la suprématie américaine ne tient donc plus, qu’un équilibre des forces est de facto rétabli.
En fait c’est même plus que cela : « comme vous le savez sans doute aucun autre pays n’a développé quelque chose comme ça » affirme-t-il, et « aucun pays n’a à ce jour de telles armes dans son arsenal militaire. » Si les mots ont un sens, le Président russe vient donc en quelque sorte de « renverser la table » et d’affirmer à la face du monde que l’avance militaire de son pays le place en position de domination incontestable.
Un paragraphe en particulier décrit les capacités de missiles hypersoniques (Mach5 et plus), volant pour certains à Mach10, soit 6500km/h, pour d’autres à Mach20, c’est à dire à près de 25000 km/h :
« Contrairement aux types d’équipements de combat existants, ce système est capable d’effectuer un vol intercontinental à des vitesses supérieures à Mach 20. Comme je l’ai dit en 2004, en atteignant sa cible, le missile de croisière en vol plané s’engage dans des manœuvres latérales intensives – horizontales et verticales – sur plusieurs milliers de kilomètres. C’est ce qui le rend absolument invulnérable à tout système de défense aérienne ou antimissile. L’utilisation de nouveaux matériaux composites a permis à ce type de missile de réaliser un vol guidé à longue distance pratiquement dans des conditions de formation d’un plasma. Il vole vers sa cible comme une météorite, comme une boule de feu. La température à sa surface atteint 1600-2000 degrés Celsius, mais le missile est guidé de manière fiable. Pour des raisons évidentes, nous ne pouvons pas montrer l’apparence extérieure de ce système ici. C’est toujours très important. J’espère que tout le monde comprend cela. Mais laissez-moi vous assurer que nous avons tout cela et que cela fonctionne bien. »
Dans un article (2) commentant ce discours, l’auteur américain William F. Engdahl précise et enrichit la traduction des expressions utilisées par le Président russe pour qualifier le vol de ces nouveaux engins :
Finalement, le Président russe a révélé les développements d’« Avant-garde » [авангард], un autre missile hypersonique volant à des vitesses excédant Mach 20 : « Dans sa trajectoire vers sa cible, le bloc de croisière glissant du missile [certainement plutôt : surfant en apparence sur son onde de choc, mais en fait plutôt sur un coussin d’air ionisé formant un plasma, technologie MHD, NdT] peut s’engager dans des manœuvres intenses, à la fois latérales (de plusieurs milliers de kilomètres) et verticales. C’est ce qui le rend absolument invulnérable face à tout système de défense antimissile ou antiaérien. L’utilisation de nouveaux matériaux composites [certainement aussi des supraconducteurs, NdT], ont rendu possible de permettre au bloc glissant du missile de réaliser un vol guidé sur une longue distance, pratiquement dans les conditions d’une formation d’un plasma [MHD, confirmation, NdT]. Il vole vers sa cible comme une météorite, comme une boule de feu. La température à sa surface atteint les 1600-2000°C mais pourtant le bloc de croisière demeure guidé avec fiabilité. »
Ondes de choc, air ionisé, plasma, boule de feu, nous voilà soudain projetés dans l’univers de Jean-Pierre Petit et de la « magnétohydrodynamique » !
Une présentation rapide du personnage : Jean-Pierre Petit est un astrophysicien, ancien directeur de recherche au CNRS, qui a travaillé pendant des années sur la magnétohydrodynamique (MHD), d’abord dans des laboratoires de recherche publique puis ensuite à son compte, mais aussi sur bien d’autres sujets. Selon lui les recherches dans ce domaine étaient en bonne voie dans les années 60/70 mais pour diverses raisons qu’il commente abondamment dans divers interviews et dans ses livres, les pouvoirs publics ont décidé de les abandonner.
Un autre aspect de sa carrière, qui l’a sans doute rendu définitivement infréquentable pour les milieux scientifiques officiels, est qu’il s’est beaucoup intéressé au phénomène ovni, allant même dans les années 80 jusqu’à accréditer l’idée d’un contact en cours entre humains et extra-terrestres (l’affaire « Ummo »). Sa passion pour les extra-terrestres n’est pas sans rapport avec ses recherches puisque l’évidence pour lui de l’existence d’intelligences extra-terrestres a grandement nourri sa réflexion.
Il a publié de nombreux livres ainsi qu’une série de bandes-dessinées de vulgarisation scientifique (les aventures d’Anselme Lanturlu), illustrées avec talent par ses soins.
Âgé aujourd’hui de 81 ans il travaille toujours à l’élaboration d’un nouveau modèle cosmologique dont la validité aurait pour conséquence de rendre envisageables les voyages intergalactiques (projet Janus). Avec Jean-Pierre Petit on ne s’ennuie pas ...
Pour le commun des mortels Jean-Pierre Petit est donc un personnage complexe, difficile à cataloguer, esprit libre, authentique chercheur reconnu, considéré par certains comme un génie et par d’autres comme un affabulateur.
Revenons à la magnétohydrodynamique. Sans rentrer dans les aspects techniques complexes de cette discipline, on pourrait dire que le sujet centrale de la MHD, selon Jean-Pierre Petit lui-même est le suivant :
« Au coeur de cette recherche il y avait une idée passionnante : est-il possible de faire évoluer un engin dans l’air à vitesse supersonique, et même hypersonique, en air dense, sans créer de bang, d’onde de choc ? » (3) (4)
En gros il s’agirait de se débarrasser des effets du frottement de l’air avec la surface d’un corps en mouvement en l’enveloppant d’un « plasma onisé ». La propulsion MHD provoque une aspiration de l’air à l’avant de l’aéronef en mouvement, les frottements et donc la résistance du milieu (air dense) sont supprimés, le corps est aspiré comme dans le vide et peut atteindre rapidement des vitesses fulgurantes. Cette technologie serait applicable en milieu liquide également.
La technologie MHD permettrait par exemple à un aéronef de gagner rapidement l’ionosphère, à 60 km d’altitude, et ensuite de se déplacer en surfant (wave rider) comme un galet rebondit sur la surface de l’eau. Paris serait à 25 rebonds de New-York. (5) (6)
Dans une conférence en 2003 (7) Jean-Pierre Petit prétend que lors d’un certain congrès de Brighton auquel il participait en 2001 d’éminents spécialistes américains lui auraient confirmé l’existence aux USA d’engins volant avec la technologie MHD.
Sa thèse est que les laboratoires de recherche français ont fait de mauvais choix, influencés par les Américains qui ont prétendu abandonner ces recherches sans avenir, persuadant du coup les Français de faire de même, alors qu’en secret ils travaillaient dur sur le sujet. Ils maitriseraient cette technologie depuis les années 90 : projets Aurora, Ajax pour les Russes (mais abandonné dans les années 90 faute de moyens), dont on trouve de nombreuses vues d’artiste sur internet.
Jean-Pierre Petit affirme qu’au début des années 2000 les Français avaient 25 ans de retard sur les Russes et les Américains, qui fabriquaient dit-il déjà en 1980 des torpilles se déplaçant sous l’eau à 2000km/h, sans doute 3000km/h au début des années 2000.
Dans cette même conférence de 2003 (7), il explique maquette à l’appui ce qu’il pense être le fonctionnement des aéronefs type « Aurora » équipés de la technologie MHD. Beaucoup de spéculations techniques, en particulier sur la raison pour laquelle ces aéronefs seraient furtifs et échapperaient à la détection des radars.
Pour Jean-Pierre Petit il n’y a aucun doute : ces avions MHD/plasma volaient déjà en 2001 depuis plus de 10 ans. S’il est dans le vrai il y a donc 30 ans que des véhicules hypersoniques traversent l’espace au dessus de nos têtes sans existence officielle.
Le rapprochement des propos du président russe avec les spéculations de Jean-Pierre Petit sont tout de même assez saisissantes. On peut accuser le second de n’être qu’un doux rêveur, difficile d’accuser le Président de la deuxième nation la plus nucléarisée au monde de raconter n’importe quoi, et de risquer pour cela un grand discrédit.
On peut alors se poser quelques questions :
- Si des technologies comme la MHD permettant aujourd’hui à des aéronefs de voler à des vitesses fulgurantes existent bel et bien, comment se fait-il qu’on (le grand public) n’en sache rien ?
- Est-il possible que de tels appareils existent, volent et que nul ne les voie, que personne ne les aie filmés, photographiés, que la grande presse n’en parle pas ou si peu ?
- Si des technologies aussi avancées existent d’ores et déjà, pourquoi ne sont-elles pas appliquées au domaine civil ? Si l’on peut voler à Mach 10 dans des engins silencieux pourquoi se traîne-t’on encore dans de gros avions lents et polluants ?
Ces questions finalement ressemblent fort à celles qui s’appliquent généralement aux questions d’ovnis, et sans doute le même genre de réponses peuvent y être appliquées :
- Si ça existait ça se saurait, ça n’aurait pas pu rester secret aussi longtemps
- Si de tels engins volaient il y aurait de preuves concrètes de leur existence, on les aurait filmés, photographiés de manière incontestable.
Nous voilà donc renvoyés à nos doutes, à nos interrogations. Nous levons les yeux, scrutons le ciel et n’y voyons rien d’inhabituel.
Plus de 70 ans après l’utilisation de la première bombe atomique il faut bien admettre que la majorité d’entre nous n’a aucune idée de l’état d’avancement des technologies de pointe et des innovations aussitôt appliquées dans le domaine militaire au renforcement de la puissance des grandes nations.
Au dessus de nos têtes, dans un air raréfié et glacial, entre 30 et 300km, se joue peut-être une partie dont nous ignorons tout.
Soyons positifs : les inventions les plus géniales verront forcément un jour leur application dans le domaine civil, reste à espérer qu’elles n’aient pas d’abord été utilisées pour leurs capacités de dévastation.
En attendant, les deux pieds collés au sol, nous en sommes réduits à spéculer face à nos écrans d’ordinateur. Nous ne sommes en fait guère plus avancés que les hommes du passé. Nous croyions savoir, nous ne savons rien.
Loin des mystères des laboratoires de recherche secrets, nous devons nous faire notre propre idée sur la réalité du monde, partagés entre les perceptions de nos sens, les bribes de connaissances scientifiques qui nous sont accessibles, mais aussi l’abondance de spectacles que déverse sur nous l’industrie d’Hollywood pour combler notre soif de mystère et d’espace à grand renfort d’effets spéciaux : un feu d’artifice de galaxies, de voyages interstellaires, de vaisseaux cotoyant les trous noirs et de voyages dans le temps. Tout cela dans notre tête se mélange, s’interpénètre, fabrique notre conscience du monde.
Le Président russe a-t-il bluffé ?
Le ciel au dessus de nos têtes est-il sillonné par de mystérieuses machines humaines filant comme des comètes, mais aussi par des vaisseaux remplis de « petits gris » ?
Jean-Pierre Petit est-il un affabulateur ou bien un formidable précurseur dont le génie ne sera reconnu que dans quelques décennies ?
L’avenir nous le dira.
(2) http://lesakerfrancophone.fr/poutine-ne-fait-pas-que-de-lesbroufe-nucleaire-ses-arguments-sont-bien-reels Texte original : https://journal-neo.org/2018/03/06/putin-is-not-rattling-nuclear-sabers-it-s-real/
(3) Présentation de la MHD sur le site de Jean-Pierre Petit : https://www.jp-petit.org/science/mhd/mhd_fr.htm
(4) Dans ce court reportage (10mn) on voit Jean-Pierre Petit expliquer ses recherches au début des années 80, avec des images d’une sorte de soucoupe entourée d’un halo lumineux :https://www.youtube.com/watch?v=g3UMwR3tVVE
(7) Conférence de Jean-Pierre Petit à Cavaillon en 2003 au festival Science Frontière : mn 27.30 : présentation d’une maquette d’Aurora mn 40 : présentation d’une maquette de B2https://www.youtube.com/watch?v=-cFqkI1LFMk
(5) Hypersoar, comment ça marche : https://www.jp-petit.org/nouv_f/Hypersoar.htm (6) Hypersoar, description du vol : https://www.youtube.com/watch?v=7TBGVfHeKZ4
Le modèle Janus de Jean-Pierre Petit en video : https://www.youtube.com/watch?v=MwKT9XqbCI8
Biographie de Jean-Pierre Petit : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre_Petit
La Chine a déjà présenté officiellement des missiles hypersoniques il y a quelques années :https://www.youtube.com/watch?v=Dfp6oGiRDVg